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Fractures de l’extrémité supérieure du fémur
Dans le même esprit que le billet sur la fracture bimalléolaire, quelques éléments d'information sur les fractures de l’extrémité supérieure du fémur :
"6.1 Definition, épidémiologie Véritable problème de santé publique, car leur incidence ne cesse de croître, les fractures de l’extrémité supérieure du fémur sont lourdes de conséquence. En effet elles mettent en jeu le pronostic vital chez les personnes âgées et le pronostic fonctionnel chez le sujet jeune.
Ces fractures sont extrêmement fréquentes, quotidiennes dans les services d’accueil des urgences.
Dans la forme typique il s’agit d’une fracture du sujet âgé, de sexe féminin (2/1) survenant au décours d’une chute de sa hauteur (parfois la fracture est spontanée et entraîne la chute). La population féminine est plus souvent atteinte car la principale cause de ces fractures est l’ostéoporose, plus fréquente en post-ménopausique. Chez le sujet jeune, il s’agit d’un accident violent à haute énergie, souvent dans le cadre d’un polytraumatisme.
6.2 Ce qu’il faut comprendre
6.2.1 Sur le plan anatomique
•Le col fémoral est le segment osseux reliant la tête fémorale aux massifs trochantériens. Ce col fémoral forme avec la diaphyse fémorale un angle de 130° (angle cervico-diaphysaire) dans le plan frontal, et de 10 à 15° vers l’avant dans le plan sagittal appelé antéversion.
•Le massif trochantérien comprend le grand trochanter, sur lequel s’insère le muscle moyen fessier, et le petit trochanter, sur lequel s’insère le muscle psoas. Ce massif osseux se situe juste en dessous du col fémoral. Il s’agit d’un os spongieux très bien vascularisé, donc exposant peu au risque de pseudarthrose et consolidant facilement.
6.2.2 Dans les fractures de l’extrémité supérieure du fémur il faut différencier deux types
•Les fractures du col du fémur (cervicales vraies).
•Les fractures pertrochantériennes.
Ces fractures sont opposées car elles ont des évolutions naturelles différentes.
En effet la face postérieure du col du fémur possède des rapports anatomiques intimes avec l’artère circonflexe postérieure, principal élément de vascularisation de la tête fémorale. Lors d’une fracture cervicale cette artère peut être lésée et entraîner une complication majeure : la nécrose aseptique de la tête fémorale.
Cette artère circonflexe postérieure n’est pas atteinte lors d’une fracture pertrochantérienne, n’exposant pas la tête fémorale à un risque de nécrose.
Une autre complication majeure pouvant survenir après le traitement orthopédique ou chirurgical, est la pseudarthrose du col fémoral, apanage des fractures cervicales vraies.
En effet les contraintes mécaniques auxquelles sont soumises ces deux régions sont opposées :
•Les forces mécaniques séparent les fragments au niveau du col fémoral, favorisant la pseudarthrose dans les fractures cervicales vraies.
•Alors qu’elles les impactent au niveau du massif trochantérien aidant ainsi la consolidation osseuse, parfois en cal vicieux dans les fractures pertrochantériennes.
6.2.3 Evolution naturelle L’évolution naturelle de ces fractures se fait vers des complications potentiellement mortelles chez les personnes âgées. Il n’est donc pas possible de laisser un blessé immobilisé pendant 3 à 6 mois, délai de consolidation de ces fractures. Dès lors le traitement chirurgical expose à moins de complication que l’abstention thérapeutique qui serait un véritable abandon thérapeutique et qui aboutirait au décès du blessé.
Le but du traitement est donc de redonner au malade l’autonomie qu’il avait avant sa chute, le plus rapidement possible et d’éviter les complications de décubitus et les décompensations de tares qui mettent en jeu le pronostic vital du patient. Seule la chirurgie répond au mieux à cet impératif. Cet acte chirurgical doit être réalisé le plus précocement possible. Il s’agit d’une urgence chirurgicale.
Ces patients âgés ne supporteraient pas plusieurs interventions, on ne peut donc pas proposer un traitement qui expose à des complications tardives nécessitant un nouveau traitement chirurgical, telles que l’ostéonécrose aseptique ou la pseudarthrose du col fémoral. Dès lors un remplacement prothétique de la tête fémorale s’impose.
Chez les patients plus jeunes (avant 60 ans), la tête fémorale doit être conservée, même dans les fractures très déplacées, dans le but de préserver le capital osseux.
6.6 Traitement
6.6.1 Principes Le but du traitement est de redonner l’autonomie le plus rapidement possible. Pour cela, les principes thérapeutiques sont les suivants :
•Hospitalisation et traction collée à visée antalgique.
•Mise en condition du malade avant de l’opérer (arrêts des médicaments potentiellement toxiques pour une intervention : AVK, Aspirine, IEC ; réhydratation, équilibration d’un diabète, traitement d’une infection urinaire...)
•Bloc opératoire : traitement chirurgical.
•Remise en charge précoce quel que soit le montage, à l’aide d’un déambulateur ou de cannes béquilles.
•Rechercher la cause de la chute (AVC, IDM, PHC, excès médicamenteux...).
•Rééducation douce du membre inférieur, mobilisation de la hanche et du genou, aide à la marche.
•Prévention des complications de décubitus précédemment citées.
•Orientation vers un centre de convalescence.
• Prévention de la porose et de la malacie osseuse (alimentation, soleil, exercice, calcium et VitD, Fluor Etc...) et des chutes.
6.6.2 Méthodes
6.6.2.1 Traitement fonctionnel Encore appelé méthode de Lucas-Championnière. Traitement abandonné actuellement, qui était réservé aux patients en mauvais état général. Cette méthode consistait en des soins de nursing et une mise au lit-fauteuil afin d’éviter les complications de décubitus.
6.6.2.2 Traitement orthopédique Une traction collée peut être posée à titre antalgique, en attendant une chirurgie. Le traitement orthopédique consiste en une mise en décharge sans appui pendant 3 mois.
6.6.2.3 Traitement chirurgical
Ostéosynthèse :◦Vissage dans l’axe du col fémoral.
◦Vis-plaque (type DHS, THS), clou-plaque ou clou-gamma.
Sous anesthésie, le blessé est installé sur une table orthopédique. La réduction de la fracture est obtenue par traction dans l’axe et rotation interne du membre, contrôlée sous amplificateur de brillance. L’extrémité supérieure du fémur est alors abordée par voie externe. La fracture est synthésée par une vis qui suit l’axe du col et va se fixer dans la tête. Cette vis est ensuite solidarisée à une plaque fixée à la partie externe du fémur.
Prothèse cervico-céphalique monobloc type Moore ou prothèse intermédiaire à double mobilité.
6.6.3 Indications
6.6.3.1 Fractures cervicales
Fractures Garden 1 et 2Fractures stables et à faible taux d’ostéonécrose aseptique de la tête fémorale et de complication.•Ostéosynthèse : fixation en place (sans réduction) par deux vis axiales ou par une vis-plaque.
•Traitement orthopédique pour certains chez le sujet jeune.
Fractures Garden 3 et 4•Avant 60 ans : Ostéosynthèse.
Il faut tenter de préserver le capital osseux et donc conserver la tête fémorale chez ces patients jeunes.
•Après 70 ans : Prothèse.
Il faut traiter ces patients en un seul acte chirurgical et éviter de les exposer aux complications dues à la conservation de la tête fémorale, et à l’alitement prolongé.
•Entre 60 et 70 ans : Ostéosynthèse ou Prothèse.
Selon l’état physiologique du patient.
Cette présentation des indications est un peu schématique, en pratique le type de traitement envisagé dépend plus de l’âge physiologique que de l’âge civil
6.6.3.2 Fractures trochantériennes Ostéosynthèse quel que soit l’âge, dans l’immense majorité des cas.
Prothèse dans certains cas particuliers : fracture très instable ou grande ostéoporose car il existe un risque d’échec de l’ostéosynthèse (démontage, migration des vis céphaliques dans le cotyle).
6.7 Conclusions Fractures du sujet âgé ostéoporotique au décours d’une chute qu’il faut documenter, dont le pronostic est vital. Le traitement est résolument chirurgical pour redonner l’appui rapidement et sans risque de déplacement secondaire (synthèse solide ou prothèse).
En augmentation permanente du fait du vieillissement de la population : cela deviendra un vrai problème de santé publique à court terme (hospitalisation en court et moyen séjour de 3 mois quasi-systématique après traitement chirurgical). Il faudra à coup sur agir de manière préventive sur l’ostéoporose et l’ostéomalacie et sur la structure d’aval (moyens séjours de réadaptation fonctionnelle)."
source : http://www.chups.jussieu.fr/polys/orthopedie/polyortho/POLY.Chp.6.html